Ce départ intervient sur fond de tensions régionales croissantes, alors que Kigali dénonce une mise à l’écart orchestrée par Kinshasa, tandis que cette dernière y voit la confirmation d’un isolement diplomatique du régime rwandais.
Dans un communiqué transmis à la presse, les autorités congolaises ont salué ce qu’elles considèrent comme une clarification bienvenue au sein de l’organisation régionale. « Le Rwanda a fait le choix de quitter une organisation qui œuvre pour la paix, la stabilité et l’intégration régionale, parce qu’il refuse de répondre de ses actes en République démocratique du Congo », a déclaré un porte-parole du gouvernement congolais.
Le retrait de Kigali fait suite à un différend autour de la présidence tournante de la CEEAC, que le Rwanda espérait assumer cette année. Toutefois, face aux accusations d’agression contre la RDC et au soutien présumé aux rebelles du M23, plusieurs États membres ont estimé que Kigali ne pouvait prétendre à ce rôle en pleine crise sécuritaire.
Depuis plusieurs mois, les relations entre Kinshasa et Kigali se sont fortement dégradées. La RDC accuse le Rwanda de soutenir militairement les rebelles du M23, responsables de violences graves dans l’est du pays. Ces accusations, appuyées par des rapports onusiens et de nombreuses chancelleries occidentales, ont été fermement démenties par Kigali, qui y voit une tentative de diversion de la part du pouvoir congolais.
Pour Kinshasa, le retrait du Rwanda est donc la preuve que le pays de Paul Kagame refuse toute forme de responsabilisation régionale. « La CEEAC a pris des résolutions claires, en appelant au retrait des forces étrangères non invitées du sol congolais. Le Rwanda ne peut s’y soustraire sans perdre toute légitimité », a martelé le ministre congolais des Affaires étrangères.
Le retrait du Rwanda de la CEEAC pourrait fragiliser davantage une organisation déjà confrontée à des défis multiples, allant de la crise sécuritaire en RDC aux tensions politiques dans plusieurs autres États membres. Cependant, pour Kinshasa, cette rupture pourrait également permettre une recomposition des alliances régionales sur des bases plus transparentes et plus équilibrées.
La RDC, qui bénéficie du soutien de plusieurs médiateurs internationaux, notamment dans les cadres du processus de Luanda et de Nairobi, espère voir renforcées les pressions sur Kigali pour un cessez-le-feu durable et un retrait effectif de tout soutien aux groupes armés actifs dans le Kivu.
Alors que le Rwanda justifie son retrait par un prétendu déséquilibre dans le fonctionnement de la CEEAC, Kinshasa affirme de son côté que cette décision n’aura pas d’impact sur les efforts de paix en cours. Au contraire, le gouvernement congolais estime que le départ de Kigali pourrait favoriser une dynamique plus constructive au sein de l’organisation, libérée d’un acteur jugé perturbateur.
Le chef de l’État congolais, Félix Tshisekedi, a rappelé à plusieurs reprises l’importance d’une coopération régionale sincère, fondée sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de chaque État. La RDC dit rester ouverte au dialogue, à condition que cessent les ingérences militaires et le soutien aux groupes rebelles.
Le retrait du Rwanda de la CEEAC marque une nouvelle étape dans la crise qui oppose Kigali à Kinshasa. Si cette décision illustre les tensions profondes entre les deux capitales, elle pourrait aussi ouvrir la voie à un rééquilibrage régional, avec une RDC de plus en plus soutenue par ses pairs et par la communauté internationale dans sa quête de paix et de stabilité à l’est du pays.