« Il doit cesser de suivre Jean-Pierre Lihau. Muyaya est un kabiliste jusqu’à la culotte. Muyaya était avec Kabila ! », a-t-il déclaré avec insistance, pointant aussi du doigt le député national Lambert Mende, ancien ministre de la Communication sous Kabila.
Des figures issues de l’ancien régime dans le gouvernement actuel
Patrick Muyaya, aujourd’hui ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, est régulièrement perçu comme un jeune cadre politique ayant émergé durant la fin de l’ère Kabila. Son positionnement actuel, très visible dans la défense des politiques du gouvernement Tshisekedi, suscite souvent la méfiance d’une frange de l’opposition, qui le considère comme une “reconversion opportuniste” plutôt qu’une véritable rupture idéologique.
Jean-Pierre Lihau, vice-Premier ministre et ministre de la Fonction publique, est également un ancien proche de Kabila. Ancien conseiller à la présidence et figure du PPRD (Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie), il a su se repositionner dans le camp de l’Union sacrée, la coalition présidentielle actuelle. Son influence sur certains dossiers de réforme de l’administration publique est notable, ce qui alimente les critiques de ceux qui estiment qu’il représente une continuité du passé plutôt qu’une dynamique de changement.
Quant à Lambert Mende, ancien ministre de la Communication et ex-porte-parole infatigable du régime Kabila, il siège aujourd’hui comme député national. Malgré une présence médiatique plus discrète ces dernières années, son nom reste associé à la stratégie de verrouillage médiatique du régime précédent.
Par cette sortie, Prince Epenge adresse un message clair au président Tshisekedi : le changement réel ne peut pas s’opérer avec les hommes de l’ancien système. Pour l’opposition, la promesse de rupture avec les méthodes du passé — centralisme autoritaire, gestion opaque, instrumentalisation des institutions — reste inachevée si les anciens piliers du kabilisme conservent des leviers de pouvoir.
LAMUKA voit dans cette “cohabitation interne” une contradiction profonde entre les discours du chef de l’État et la composition de son gouvernement. En dénonçant publiquement ces figures, Prince Epenge tente aussi de redéfinir le clivage politique, de plus en plus flou, entre l’ancien régime et l’actuel.
La déclaration de Prince Epenge intervient à un moment où LAMUKA cherche à retrouver une visibilité sur la scène politique nationale. Depuis la réélection de Félix Tshisekedi et le départ de figures majeures comme Moïse Katumbi et Jean-Pierre Bemba vers d’autres coalitions, la plateforme semble vouloir revenir à son ADN initial : celui d’une opposition radicale au système Kabila et à toute tentative de continuité politique déguisée.
En ciblant les personnalités les plus visibles et stratégiquement placées au sein de l’appareil étatique, LAMUKA veut montrer qu’elle reste vigilante et qu’elle incarne une véritable alternative débarrassée, selon elle, de tout compromis avec le passé.
Derrière cette sortie médiatique musclée, certains analystes voient aussi une manœuvre destinée à repositionner Prince Epenge sur le devant de la scène politique, dans une perspective d’élargissement du socle de LAMUKA en vue des prochaines échéances électorales locales et nationales.
En effet, si les personnalités visées comme Patrick Muyaya ou Jean-Pierre Lihau ne réagissent pas frontalement, il n’est pas exclu que cette accusation de “kabilisme actif” relance les débats sur la cohérence de l’Union sacrée et sa capacité à incarner réellement la rupture.
Les propos de Prince Epenge rappellent à quel point la mémoire du kabilisme continue de hanter la vie politique congolaise. Même après deux élections présidentielles et un changement de régime, la question de l’héritage, des alliances et de la fidélité idéologique reste au cœur des batailles politiques. Pour Félix Tshisekedi, la pression monte non seulement sur les résultats, mais aussi sur la clarté du cap et de ceux qui l’accompagnent dans son exercice du pouvoir.