L’audition des témoins évoqués dans le procès opposant le ministère public contre Vital Kamerhe et ses coaccusés, a permis de lever quelques zones d’ombre au sujet des décaissements opérés à la présidence de la République dans le cadre du programme de 100 jours du Président Fatshi. Alors que certains de ses collaborateurs du Cabinet semblent utiliser la justice pour régler des comptes, Vital Kamerhe voit le Comptable de la République exposer clairement les opérations qui se sont déroulées et leurs destinations.
Au sujet du ministre John Ntumba, le comptable précise que celui-ci était bel et bien chargé du suivi des dépenses au sein de la présidence du pays. Il a reçu des fonds à destination de Muhima pour dédouanement des containers des maisons préfabriquées à destination de Mweneditu ; ce qui a été fait. Ainsi, les choses se sont quand même un peu plus précisées, notamment avec le témoignage du comptable et le contre témoignage correspondant du prévenu Kamerhe.
Quelques faits
- VK a été objectivement contredit sur plusieurs points, ci-dessous, par certains acteurs évoqués par lui-même;
- Contrairement à ce qu’il avait fait croire, la supervision du programme était en réalité assurée par lui-même. L’équipe de supervision n’était pas pleinement opérationnelle;
- Contrairement à ce qu’il avait fait croire, c’est bien lui VK qui autorisait des mouvements de fonds; curieusement, des fonds ont circulé en liquide en provenance de la banque du Congo. Pas de compte ni chéquier pour effectuer des paiements ;
- Bien qu’étant le principal ordonnanceur des dépenses, bien que des fonds aient circulé en liquide, Kamerhe n’y touchait pas. L’argent était gardé dans des coffres du comptable et c’est ce dernier qui le distribuait pour des paiements planifiés.
- Et tous ceux qui ont perçu ces fonds ont affirmé les avoir utilisés selon les libellés.
Soucis pour Kamerhe
Des demi-vérités concernant la supervision du programme ont créé de la suspicion à son égard. Il aurait dû assumer clairement dès le départ le choix qu’il avait fait de prendre le contrôle du projet et de court-circuiter intentionnellement certaines règles de gestion contractuelle pour pouvoir répondre plus agilement aux attentes du chef de l’État.
Soucis pour l’accusation
Le modus operandi des détournements allégués n’a finalement pas été clarifié. L’investigation des comptes de Mme Amida Kamerhe n’a pas permis de découvrir d’importantes sommes d’argent ni de virements douteux. Mme Kamerhe semble même avoir valablement justifié la provenance de ses 800.000$. De plus, les acteurs ayant témoigné contre Kamerhe semblaient tous avoir un compte à lui régler. Certains semblaient tellement heureux de le charger qu’ils ont presque savouré leur vengeance en donnant un show. Il y a même eu un incident. Au moins trois types d’animosités peuvent être identifiés, contre M. Kamerhe à travers des témoignages entendus :
- Des conflits d’ego l’opposant à certains collaborateurs incroyablement vaniteux, qui contestaient son autorité ;
- Des conflits d’intérêt avec des ministres sortant auxquels il avait retiré des portefeuilles qu’il avait ensuite gérés lui-même, 7 mois durant, leur donnant l’impression qu’il se trouvait meilleur que l’ensemble des ministres remerciés ;
- Des conflits partisans entre des conseillers membres de l’UDPS et ceux de l’UNC, avec un soupçon de rivalité tribale Kassai/Sud-Kivu.
Commentaires
Il sera peut-être difficile pour le juge de condamner Kamerhe sur base de l’accusation et de la défense qui ont été présentées. Soit Kamhere n’est pas coupable des faits qui lui sont reprochés soit le Ministère public n’avait pas terminé son devoir. Il faudra donc acquitter M. Kamerhe, même s’il mérite sans doute de sévères reproches pour :
- Avoir mis en place un système de paiement archaïque, sans compte ni chéquier, exposant la présidence à des malversations ;
- Avoir écarté du projet, des parties prenantes importantes qui avaient des avis pertinents à ce sujet ;
- Avoir tenté d’induire le Tribunal en erreur en prétendant qu’il n’avait rien à voir avec des transferts de fonds.
Conclusion
Kamerhe n’est vraisemblablement pas très populaire au pays, en dehors de son fief. Peu de compatriotes semblent intéressés à le défendre contre une possible erreur judiciaire ou injustice. Le problème est que dans une démocratie naissante, toute injustice est dangereuse pour la société par le fait qu’elle génère une antivaleur très nuisible à l’harmonie. Les démocrates ont, vis-à-vis de la Justice, un devoir de vigilance qui doit rester infaillible. Il ne faut absolument pas permettre que des politiciens règlent leurs éventuels comptes par le truchement de la Justice. Si cela se produit, c’est le peuple qui est floué peu importe que la victime soit aimable ou pas.
Espérons que ce bouillant politicien sera acquitté et qu’il apprendra à se détacher d’indignes jeux d’Appareil pour servir franchement le peuple, la Justice et le processus électoral.
Njoli Bodjenga.