A qui appartient la Société Minière de Bisunzu”SMB”dont Edouard Mwangachuchu est réputé propriétaire ? C’est une question survenue à l’audience du mardi dernier dans l’affaire dite Mwangachuchu dont le procès se poursuit ce vendredi 16 juin devant la Haute cour militaire.
S’appuyant sur les statuts de cette société, anciennement MHI (Mwangachuchu Hizi International), le prévenu a dit n’en être pas propriétaire, alors que dans ses propos devant le ministère public consignés dans un procès-verbal il avait reconnu en être le propriétaire promoteur avant de la céder à ses enfants. Par quel acte et quand cette mutation a-t-elle, du reste, eu lieu ? Et comment lui-même a-t-il acquis le titre sur le PE 4731, une portion amputée anarchiquement du PE 76 de SAKIMA SA, une entreprise publique, et obtenue comme butin de guerre en 2000 lors de l’occupation de la partie orientale du pays par le RCD. Rien ne justifie qu’un tiers accapare sans titre ni droit un patrimoine de l’Etat. Le prévenu Mwangachuchu veut tout simplement tourner en bourrique la Haute cour militaire, et par devers l’Etat congolais. Tout donc doit être mis en œuvre par l’Etat propriétaire pour déchoir le titre indument obtenu dont se prévaut la SMB afin de rétablir la société étatique précitée dans ses droits. Après avoir suspendu les activités de la SMB, la ministre des Mines ne doit pas s’arrêter en si bon chemin.
Difficile de séparer la société SMB et le prévenu Mwangachuchu, poursuivi en flagrance devant la Haute cour militaire pour haute trahison, association de malfaiteurs, atteinte à la sécurité de l’Etat, détention illégale d’armes et munitions de guerre, participation à un mouvement insurrectionnel et incitation des militaires à commettre des actes contraires au devoir et à la discipline. Ceci d’autant que le PE 4731, concession dans laquelle son entreprise s’emploie à des activités minières, est non seulement un repaire des éléments suspects, sans numéros matricules et sans unités de provenance, couverts par des bulletins de service de la police nationale, mais aussi de caches d’armes découvertes parallèlement aux tentatives de la capture du territoire de Masisi par les troupes des RDF/M23. Et dans ce cas et selon toute logique, le maître des lieux ne peut qu’intéresser les instances judiciaires impliquées dans la manifestation de la vérité. C’est ce qui expliquerait la démarche de la cour à l’audience du mardi 13 juin en posant la question à l’un des renseignants, en l’occurrence le commissaire divisionnaire Vital Awashango, chef de la police au Nord-Kivu entre 2013 et 2019, de savoir à qui appartient la société SMB.
A cette question, le renseignant a répondu : le propriétaire de SMB, c’est Edouard Mwangachuchu. Comment le savez-vous ? C’est lors du conflit ayant opposé cette dernière à la COOPERAMMA (Coopérative des Exploitants Artisanaux Miniers de Masisi). En effet, le conflit permanent entre la SMB et cette coopérative est un secret de polichinelle. Cette dernière a enregistrée dans ses rangs beaucoup de victimes de la barbarie de la garde de la société de Mwangachuchu. Depuis juin 2019, trois corps de leurs membres sont gardés à la morgue de l’hôpital général de Goma. La communauté et leurs familles réclament justice avant leur inhumation.
Autant Edouard Mwangachuchu voudrait se soustraire du procès en sollicitant une liberté provisoire pour aller se faire soigner à l’étranger, piège dans lequel la haute cour militaire se refuse de tomber jusque-là, autant il veut désengager sa responsabilité au vu de la gravité des faits qui lui sont reprochés en voulant prendre ses distances avec sa société. A vrai dire, il tient à tourner en bourrique la Haute cour militaire et pars devers elle l’Etat congolais qui s’est montré généreux en lui faisant bénéficier indument son patrimoine depuis des lustres.
En effet, le PE 4731, dont se prévaut la SMB et son promoteur propriétaire, est une portion de la société étatique SAKIMA SA obtenue en 2000 comme butin de guerre lors de l’occupation de l’Est du pays par le RCD. Il n’y a ni acte de cession, ni acte de vente entre les deux sociétés. En principe, la mainmise du RCD sur tous les patrimoines de l’Etat dans les zones jadis sous son contrôle a cessé dès lors qu’il y a eu réunification du pays après le dialogue inter congolais. Par exemple, les directions provinciales de la Regideso, de la SNEL et de bien d’autres organismes de l’Etat sont revenus depuis dans le juron du gouvernement national. L’avantage dont le RCD a continué à bénéficier à travers la SMB ne se justifie donc pas, SAKIMA SA étant une société publique au même titre que les autres. Plus de vingt après, tout doit être mis en branle par l’Etat propriétaire, au travers de toutes ses institutions, principalement du gouvernement, pour récupérer la portion de la concession de SAKIMA SA dont jouit indument un tiers, soupçonné, du reste, de faire le lit de l’ennemi en marge des Code et Règlement miniers. Après avoir suspendu toutes les activités de la SMB, la ministre des Mines n’a pas de raisons de tergiverser pour déchoir le titre du PE 4731.
Par ailleurs, le fait par Edouard Mwangachuchu de vouloir se débiner en tant que propriétaire de la SMB est à la limite un mépris pour aussi bien les communautés du Masisi envers lesquelles il est en conflit permanent, parce que se considérant avoir été flouées par le prévenu, que l’Etat congolais. En effet, il existe une procédure en matière de mutation des sociétés. Par quel acte le promoteur prioritaire de MHI a-t-il cédé celle-ci, devenue entretemps SMB, à ses enfants ? Les statuts seuls ne suffisent pas. Même alors, il en reste l’autorité morale et tout tourne autour de lui.